Média positif et engagé pour un sport durable

Milan-Cortina 2026 : Des Jeux durables, rêve ou réalité ?

Milan-Cortina 2026 : Des Jeux durables, rêve ou réalité ?
© Olympics
Twitter
LinkedIn
Facebook
WhatsApp
Email

À moins d’un an des Jeux olympiques d’hiver de Milan-Cortina 2026, en Italie, annoncés comme éco-responsables, la réalité du terrain contraste avec les promesses. Retards dans les travaux, manque de transparence, infrastructures dont la durabilité interroge : les engagements écologiques peinent à se concrétiser.

Le 6 février 2026, entre Milan et Cortina d’Ampezzo, célèbre station de ski transalpine, s’ouvriront les Jeux olympiques et paralympiques d’hiver 2026. Le Comité national olympique italien mise sur des Jeux durables, à en croire les prises de parole successives des dirigeants italiens. “Milan-Cortina 2026 a l’intention d’adopter une approche réaliste, concrète et progressive de la durabilité et de l’héritage des infrastructures, dans laquelle toutes les parties prenantes sont impliquées.” La promesse est belle, mais sur le terrain, la situation est bien plus nuancée. Une habitude ?

La question écologique des Grands Événements Sportifs Internationaux (GESI) est plus que jamais d’actualité. Derrière les discours officiels, la réalité est bien souvent différente. Souvenez-vous des Jeux d’hiver de Pékin 2022 : le Comité international olympique (CIO) promettait des JO 100% écologiques, alors que 100% de la neige utilisée était artificielle, une première pour ce type d’événement. Une forêt avait même été rasée pour l’occasion. La France recevra les Jeux d’hiver suivants, en 2030, avec un projet également annoncé comme durable et respectueux de l’environnement, mais largement contesté par les associations et les locaux.

> Lire aussi : JO d’hiver 2030 en France : 20 ONGs et 125 personnalités posent les conditions environnementales

90% d’équipements existants

L’un des principaux arguments du comité d’organisation repose sur le choix de sites déjà existants pour accueillir les épreuves. Contrairement aux JO de Sotchi en 2014, où la Russie avait dépensé 34 milliards d’euros pour des infrastructures massives, ou aux JO de Pékin en 2022, qui ont nécessité un enneigement artificiel à hauteur de 100%, Milan-Cortina 2026 compte limiter la construction de nouveaux équipements.

Diana Bianchedi, responsable des questions environnementales et d’héritage au sein du comité d’organisation, insistait sur cet aspect auprès de l’AFP : “Nous n’avons pas construit les Jeux sur le territoire, mais nous sommes partis de ce que le territoire nous donnait pour les construire.” Dans cette optique, 90% des sites qui accueilleront les épreuves sont déjà en place, selon l’organisation italienne, notamment Anterselva pour le biathlon, Val di FIemme pour le ski nordique, Cortina d’Ampezzo et Bormio pour le ski alpin, et Milan pour les compétitions sur glace.

Ainsi, au lieu d’être concentrés autour de deux pôles principaux (glace/ville et neige/montagne), les troisièmes Jeux olympiques d’hiver italiens seront répartis sur six sites distincts, appelés “clusters”, certains séparés par plusieurs centaines de kilomètres. Un modèle que l’on retrouvera en 2030 dans les Alpes françaises… mais qui risque aussi d’accentuer les émissions de gaz à effet de serre émis par les déplacements des publics sur les différents sites.

En effet, aucun plan de mobilité durable n’a été prévu, en Italie, pour limiter l’impact des transports sur le bilan carbone des Jeux : aucune trace d’un quelconque investissement qui améliorerait les déplacements entre les différents sites assez éloignés, et réduirait les émissions de CO2 associées. L’afflux massif de spectateurs et d’équipes en un laps de temps réduit pose pourtant des défis logistiques majeurs, dans des régions déjà fragilisées par le changement climatique.

Une piste de bobsleigh au coeur de la controverse

Mais le principal symbole de cette contradiction est ailleurs : la construction d’une nouvelle piste de bobsleigh. L’Italie ne compte qu’une cinquantaine de pratiquant(e)s, et pourtant, un chantier colossal estimé à 120 millions d’euros est en cours. Aujourd’hui, les deux pistes déjà existantes ne permettent pas d’accueillir les athlètes olympiques. L’une est justement à Cortina d’Ampezzo : utilisée pour les Jeux olympiques de 1956, elle a été fermée en 2008 en raison de coûts d’entretien trop élevés. L’autre avait été construite à Cesana, dans le Piémont, pour les Jeux de Turin 2006, elle avait coûté plus de 110 millions d’euros. Elle a été abandonnée en 2011 pour les mêmes raisons.

Vanda Bonardo, présidente de Commission internationale pour la protection des Alpes (CIPRA) en Italie et représentante nationale de l’association Legambiente pour les Alpes, évoque pour Ecolosport ces travaux pharamineux. “Bien que de nombreuses infrastructures semblent bénéfiques pour les Jeux, elles ne sont pas toujours essentielles, et la question de leur avenir après l’événement reste cruciale.” L’héritage de la piste de bobsleigh, qui sera utilisée quelques jours seulement et dont la construction aura artificialisé encore davantage la montagne, est loin d’être évident : une fois les Jeux terminés, qui l’utilisera ? « Peut-être aurait-il été plus pertinent d’investir dans des infrastructures de transports durables », regrette Vanda Bonardo, au regard de l’investissement consenti pour la piste de bobsleigh.

Au-delà des infrastructures, le flou persiste sur un autre aspect. “Avec Legambiente, on a du mal à obtenir des informations concernant les Jeux. Il n’y a aucune volonté de communiquer leurs données” s’étonne Vanda Bonardo. Silence radio du côté des organisateurs, donc, qui ne donnent aucune information claire sur l’impact écologique de l’événement. Notons toutefois que le village olympique de Milan ne sera pas laissé à l’abandon. Il est prévu que les bâtiments deviennent des résidences étudiantes, tant l’accès au logement est une problématique majeure dans la capitale de la mode.

Des efforts ont été faits – et doivent être notés -, dans la droite lignée de Paris 2024, sur l’utilisation des infrastructures existantes. De ce fait, Milan-Cortina 2026 sera probablement moins émetteur en CO2 que les deux dernières éditions. Mais une certaine opacité entoure la stratégie de durabilité, et la piste de bobsleigh est justement le symbole de ce qu’il faudrait bannir pour préserver les montagnes, qui souffrent déjà beaucoup. Finalement, des Jeux d’hiver, peuvent-ils seulement être durables ?

Twitter
LinkedIn
Facebook
WhatsApp
Email

Ecolosport le PODDCAST explore la façon dont le sport peut contribuer à la réalisation des 17 Objectifs de Développement Durable (ODD) de l'ONU et comment ceux-ci peuvent soutenir le développement du sport.

Découvrez Ecolosport Académie, la plateforme qui forme les pros du sport aux enjeux écologiques et les fédère au sein de la 1ère communauté du sport durable !
NOUVEAU !
3s
Ne ratez plus rien et recevez le meilleur de l'actualité sport et écologie dans votre boite mail !