Dans moins d’un mois, le 4 février, débuteront les Jeux Olympiques d’hiver de Pékin 2022. Vendus comme les « plus verts et les plus propres jamais réalisés », ces Jeux relèveront-ils le défi ? Spoiler : bien sûr que non.
Nous le savons, l’une des priorités du Comité d’Organisation des Jeux de Paris 2024 est d’avoir un impact positif constituant un véritable héritage olympique pour la population et le territoire français. Qu’en est-il des ambitions du Comité d’organisation des Jeux d’hiver de Pékin 2022 ? Quelle en sera la réalité ? Si on en croit les rapports officiels de la Chine et du Comité international olympique (CIO), ces JOP de Pékin seront les « plus verts et les plus propres jamais réalisés ». Avec un plan de durabilité visant à offrir des Jeux « verts, ouverts, fédérateurs et propres », Pékin 2022 semblaient être en adéquation avec les objectifs fixés dans le Programme de développement durable à l’horizon 2030 des Nations Unies.
Une étude menée par six chercheurs européens, géographes, géophysiciens et architectes, An evaluation of the sustainability of the Olympic Games (avril 2021), a montré que la durabilité des Jeux Olympiques et Paralympiques (hiver et été confondus) diminue globalement ces dernières années et ce, tant dans leurs dimensions écologiques que sociales. Même si la volonté et les efforts des différents comités d’organisation sont réels, les Jeux Olympiques, au fil des éditions, s’agrandissent en taille et en échelle. Un nombre croissant d’athlètes, de spectateurs, d’événements et de sites émettent plus de carbone et consomment davantage de ressources naturelles.
Alors, pourquoi Pékin 2022 échapperait-il à cette tendance ? De nombreux experts et militants ont critiqué la ville hôte pour ses pratiques non durables.
Des JO d’hiver écolos sans neige naturelle ?
Pour organiser les JOP d’hiver, les villes de Pékin, Yanqing et Zhangjiakou sont particulièrement mal adaptées, avec leur climat aride. En raison de 2 cm de neige naturelle, Pékin mise largement sur l’enneigement artificiel, un processus qui consomme de grandes quantités d’eau et d’électricité, et qui entraine une augmentation des émissions carbone. La Chine estimait en 2015 qu’elle aurait besoin de 185 millions de litres d’eau pour recouvrir les pistes et, selon Yang Lan, directrice adjointe de la candidature chinoise, cela constitue un « problème très contrôlable ».
Zhang Li, directeur des sites, assure que le pays dispose de trois sources pour pallier le manque de neige naturelle : le ruissellement d’eau de surface qui fournit la station de ski de Yanqing depuis 20 ans, des réservoirs à grande capacité qui se trouvent à 6 km du site, ainsi que le transfert d’eau en Chine vers la partie nord du pays.
De l’eau rare utilisée pour de la neige artificielle
Seulement, à quelques semaines de l’évènement, il est confirmé que la fabrication de neige a entraîné le détournement de l’eau stockée dans les réservoirs normalement dédiée aux résidents locaux et aux agriculteurs, une population qui souffre déjà – en temps normal – d’une pénurie d’eau endémique. « Organiser des JO dans cette région est une aberration, c’est irresponsable » résume la géographe Carmen de Jong, de l’université de Strasbourg. Pékin ne compte déjà que sur 300 m3 d’eau par an et par habitant, soit moins du tiers de l’approvisionnement recommandé par les normes de l’ONU.
De fait, si les sites olympiques sont convertis en stations de ski permanentes comme cela est prévu, ces impacts non désirables seront de long terme. Les pistes de ski construites traversent, de plus, la réserve naturelle protégée de Songshan.
Pour rassurer le public, Pékin a promu une utilisation généralisée des énergies renouvelables, et a garanti que 85% des véhicules utilisés pour transporter les athlètes rouleront à l’électricité ou à l’hydrogène. Ces mesures nécessaires mais superficielles s’apparentent évidemment à du greenwashing… Malheureusement pour le public mais heureusement pour la planète, en raison de l’épidémie actuelle, seuls les spectateurs résidant en Chine pourront assister à ces Jeux. Mécaniquement, cela va réduire le coût écologique du transport aérien par rapport aux Jeux de Pyeongchang en 2018, comme ce fut le cas pour Tokyo l’été dernier.
Quel impact à long terme ?
Quand Pékin a été désignée ville-hôte des JO d’hiver 2022, l’une des principales volontés de la candidature chinoise était d’inciter, via les épreuves, 300 millions de chinois à se mettre aux sports d’hiver. L’important développement économique de la Chine ces dernières années et l’émergence d’une classe moyenne aisée amènent le pays à puiser trop rapidement dans ses ressources naturelles pour satisfaire les demandes de sa population.
L’Empire du milieu préfère se concentrer sur le développement et les opportunités économiques qu’offre l’émergence d’une classe moyenne chinoise qui peut se permettre des vacances au ski, et se soucie peu de la protection de l’environnement. Pourtant, les problèmes environnementaux se multiplient en Chine et touchent des domaines variés tels que l’eau, l’air, l’énergie, l’écologie, le climat, la santé ou la sécurité.
En plus du boycott diplomatique prévu par certaines nations du globe, pour protester contre le génocide et les crimes contre l’humanité en cours au Xinjiang, ces Jeux d’hiver semblent – sans surprise – être doublement controversés…