Elle a commencé le basket à Castres, dès ses 8 ans, puis a été formée à Bourges avant d’y devenir professionnelle à l’âge de 19 ans. Myriam Djekoundade est aujourd’hui une figure de l’équipe de France en 3X3, et récemment en 5X5 avec sa première sélection en A. Entre son quotidien au Basket Landes et sa récente participation aux Jeux Olympiques de Paris 2024, elle revient pour Ecolosport sur son engagement écologique avec notamment la création de l’association Green Swish.
Ecolosport : Est-ce que dans votre parcours, il y a eu un moment-clé qui a déclenché votre prise de conscience écologique, ou est-ce que le sujet est une préoccupation qui a grandi dès le début avec vous ?
Myriam Djekoundade : J’ai toujours eu ce regard sur l’environnement. J’ai fait des études en géographie, aménagement du territoire donc j’ai toujours été sensibilisé aux causes environnementales. Je pense que si je devais donner une période, même si ça s’est fait sur plusieurs années, je dirais que c’est le basket 3X3 qui m’a fait prendre conscience qu’il y avait des actions à mettre en place d’un point de vue écologique. C’est une discipline qui est très répandue. Les compétitions sont des compétitions internationales donc on se déplace beaucoup sur des tournois, dans le monde entier. Même si je pense qu’il y a des choses à faire, c’est un peu difficile de voir la discipline autrement que par ce biais-là. Par contre, le fait de jouer en extérieur, parfois dans la nature ou en ville, je trouve que ça nous relie beaucoup plus à l’environnement dans lequel on est. C’est une discipline qui est aussi très ancrée d’une culture urbaine. Les problématiques environnementales sont impossibles à délier des problématiques urbaines, donc je me suis dis qu’il y avait quelque chose à imaginer en terme d’impact, en terme de message.
En 2023, j’ai commencé à en parler avec des amies qui travaillent plutôt sur les questions sociales. J’avais envie de faire quelque chose. Si je peux avoir un impact dans mon entourage, ou auprès des gens qui me suivent, un impact qui serve une cause qui soit plus grande que moi, j’avais envie que ce soit celle-là. On a donc créé Green Swish. Le projet est vraiment né en 2024, même s’il y a eu les Jeux, une période chargée. Depuis début 2025, on reprend le bébé pour créer des évènements sur les mois qui viennent.
Quelles sont les initiatives que portent le projet ?
Myriam Djekoundade : Pour le moment, on a pas encore réellement organisé d’évènement, on travaille en ce moment-même pour en organiser un premier en 2025. Au départ, le fait de parler de cette association, c’était avec l’idée de contacter des gens qui partagent cette vision et qui défendent ces causes-là. Ça fait quasiment un an que ça a été lancé et sur la première année, on a surtout eu la chance de pouvoir rencontrer des gens, des médias, d’autres athlètes engagés. Rencontrer un tas de personnes et, ensemble, s’inspirer les uns les autres pour monter des projets. La première année a plutôt été dans l’échange.
L’idée pour cette année serait de pouvoir organiser un évènement qui permette de réunir les gens, de les sensibiliser, mais dans un esprit sportif parce que je pense que les valeurs du sport, en tout cas du 3X3 particulièrement, sont fédératrices. Ce sont des valeurs festives et j’ai envie d’organiser un évènement avec cette démarche-là, avec un message forcément axé sur l’écologie.
Si on revient à ce que vous me disiez sur les valeurs du 3X3, j’en comprends que votre engagement est davantage parti d’une inspiration de ses valeurs, que d’une contradiction entre la pratique et des engagements écologiques ?
Myriam Djekoundade : Oui, c’est vrai que cet engagement est plus né de quelque chose de positif que de points à améliorer. Pour moi, le sport – et c’est un peu ce qui a questionné ma légitimité – n’est pas le milieu le plus éco-responsable. En y réfléchissant, j’ai vu qu’il y avait vraiment beaucoup à faire et qu’il n’y avait pas de raison que le sport ne devienne pas plus vert, plus responsable, plus conscient des enjeux écologiques. Pour moi, on est tous concernés par ça, c’est la réalité. Donc oui, ce n’est pas né de cet aspect-là mais j’ai envie de faire évoluer les pratiques sportives à mon échelle, pour que demain les problématiques environnementales soient davantage prises en compte.
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Et dans votre quotidien de basketteuse, que ce soit au Basket Landes ou en équipe de France, comment vous intégrez l’écologie dans votre quotidien ?
Myriam Djekoundade : A mon échelle personnelle, déjà en tant que citoyenne, je fais le maximum. Je pense que je pourrai faire mieux, comme tout le monde pense pouvoir faire mieux, forcément. Mais en tout cas, j’ai conscience de mon impact sur l’environnement et j’essaie de le minimiser au maximum.
Dans le cadre du club, je suis arrivé dans les Landes en août et j’ai été agréablement surprise vis-à-vis des démarches entreprises pour une pratique plus responsable. J’en parle beaucoup aussi avec celles et ceux qui organisent les évènements parce qu’au final, ça tourne souvent autour du match. C’est là que l’on pourrait s’améliorer mais j’essaie de ne pas être trop moralisatrice. Les gens qui sont là mettent des actions en place et sont eux-mêmes de bonne conscience donc je ne me sens pas forcément légitime ou je ne pense pas avoir la responsabilité d’aller en remettre une couche. Mais on partage des idées sur des actions qui pourraient être mis en place autour des évènements, autour de nos matchs pour qu’ils soient plus responsables.
Au sein de la fédération, j’aimerais qu’on puisse progressivement mettre en place tout un tas de choses mais, malheureusement, plus les institutions sont grandes, plus ça prend du temps. La fédération y travaille. Il y a aussi la ligue. Je sais qu’elle est ouverte au dialogue et je suis absolument partante pour échanger avec elle et réunir des acteurs plus légitimes pour pouvoir échanger sur des actions qui pourraient être mises en place. C’est un petit peu ça aussi l’idée de Green Swish, on essaie de faire évoluer les mentalités, de sensibiliser sans pointer du doigt, sans culpabiliser les gens. On essaie de sensibiliser parce qu’il faut parler de ces sujets et essayer d’amener une dynamique positive en proposant des actions, plutôt qu’en culpabilisant les gens sur des sujets sur lesquels ils n’ont pas été éduqués, par exemple.
Si vous pouviez avoir ces discussions, qu’est-ce que vous proposerez ?
Myriam Djekoundade : Je pense qu’il y a deux points différents. Pour l’équipe, ce serait de s’organiser en collaboration avec les agglomérations par exemple pour faciliter les moyens de se rendre au stade en transport public ou en covoiturage, ce qui permettrait aux spectateurs de ne pas prendre leur voiture individuelle pour aller au match. Sur la gestion des zones VIP, il y a aussi des actions à mettre en place. Au sein de la ligue, je pense qu’il faut vraiment réussir à ritualiser les prises de parole, les sensibilisations, les mouvements, les actions qui sont faites auprès des clubs vis-à-vis de l’environnement, comme c’est le cas pour d’autres causes.
La cause environnementale est aussi une cause sociale. La ligue a un public beaucoup plus large et aussi une marge de manœuvre parfois plus pertinente que celle des clubs. Ce n’est pas du tout un reproche, parce qu’ils sont dynamiques et très ouverts à la discussion. Ceux qui y travaillent sont aussi dépendants de la manière dont les institutions fonctionnent, et mettre des actions en place prend donc du temps. Il faut aussi que ça perdure dans le temps. C’est peut-être pénible parce que ça prend du temps au début, mais il faut que ça soit durable et pertinent sur le long terme vis-à-vis de toutes les parties prenantes.

En tant qu’athlète olympique, considérez vous que les Jeux Olympiques ont constitué un levier d’action positif pour la cause environnementale ?
Myriam Djekoundade : En tant qu’athlète, j’ai forcément eu un regard très distant vis-à-vis de tout ce qui a pu être mis en place, parce que je n’en ai même pas vu à 1 % je pense. Des actions touchaient à l’aménagement de la ville où, pour moi, ils ont eu un regard responsable dans l’idée d’utiliser l’existant au maximum. Contrairement à d’autres olympiades où il y a eu beaucoup de constructions, avec les conséquences que ça engendre. Sur ce point-là, ils ont pour moi rempli la part du marché. Bien sûr, il y a des choses qui auraient pu être améliorées mais je pense que déjà l’étape a été franchie. Ils ont fait un premier pas, et le fait d’avoir mis les enjeux environnementaux au cœur des problématiques à prendre en compte pour organiser un évènement d’échelle mondiale, je pense que c’est très respectable. En terme d’évènement sportif de médiatisation équivalente, si les organisateurs prennent la parole ne serait-ce que pour dire : “On considère la cause environnementale au moment d’organiser un évènement”, je pense que c’est déjà un super message. Il faut savoir souligner ce qui est bien et ces Jeux-là ne ressemblaient à aucun autre. Donc je trouve encore une fois qu’il est bon de prendre des engagements et de prendre la parole.
Pour finir, est-ce que vous auriez un message à faire passer aux jeunes sportifs que vous inspirez ?
Myriam Djekoundade : Je n’ai pas la prétention d’inspirer qui que ce soit ! Mais je pense qu’il ne faut pas avoir peur de ne pas en faire assez, ou il ne faut pas avoir peur qu’on vous pointe du doigt en vous disant que ce que vous faites n’est pas assez. Il vaut mieux faire un peu, que rien du tout. C’est mon message. Peut-être que tous ensemble, on arrivera à faire quelque chose de grand. C’est comme ça que fonctionne le sport aussi. Je fais partie d’un sport collectif, donc je crois en la force du collectif et de l’entraide. Je pense qu’en tant que société, notre seul moyen d’agir est de s’unir. Et si à chaque fois que quelqu’un fait quelque chose, on se dit que ce n’est pas assez, on ne va jamais avancer.
Finalement, c’est ça qui vous plaît dans le basket, cette force du collectif ?
Myriam Djekoundade : Oui, c’est ça. C’est pour ça que je fais un sport collectif aussi. C’est parce qu’ensemble, on fait un projet. C’est l’addition des forces de chacun qui fait une grande équipe. Vous pouvez mettre des gens très forts ensemble mais si vous ne savez pas les faire communiquer et jouer ensemble, ils iront nulle part. C’est là où tout prend sens et pour moi, ça reflète nos sociétés, ça reflète la Terre sur laquelle on vit parce qu’on est tous impactés par la cause environnementale, donc tous acteurs. Il faut que l’on regarde tous dans la même direction. Chacun fait un petit pas et on va avancer, c’est ça l’idée.