En décembre 2024, la Fédération Française de Handball (FFHandball) a publié son premier bilan carbone, s’inscrivant ainsi dans un projet de décarbonation de ses activités à long terme. Ecolosport en a discuté avec Grégory Pradier et Elisa Badessi, tous deux salariés de la FFHandball.
La Fédération Française de Handball a réalisé en 2024 son premier bilan carbone, un état des lieux des postes d’émission de gaz à effet de serre principaux de l’année 2023. Ce bilan est le coup d’envoi du projet de décarbonation des activités fédérales. Un projet à long terme, qui vise 2050. D’ici là, d’autres bilans seront établis afin d’ajuster le plan d’action, encore en cours de construction aujourd’hui. “Le bilan carbone est un projet que nous essayons de faire avec un peu d’humilité parce que la RSE, c’est tentaculaire”, analyse Elisa Badessi, apprentie RSE au sein de la fédération.“Nous essayons de nous projeter à court, moyen et long terme car nous savons que cela ne se fera pas en un jour”.
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Un premier bilan qui réactualise les bases de la stratégie fédérale
Avec le désagréable constat que “les activités de handball et le sport en général sont une partie du problème sur le champ du dérèglement climatique, et donc certainement une partie de la solution”, la FFHandball a eu la volonté d’établir un projet RSE. Bien qu’engagée depuis 2019 par sa signature de la Charte des 15 engagements éco-responsables, la nécessité d’avoir une feuille de route claire était urgente, afin de porter la responsabilité de l’impact écologique du handball français. Le bilan carbone s’inscrit dans cette démarche et doit ainsi permettre de visualiser “quelles sont les activités les plus émettrices, et où nous allons pouvoir agir et avoir le plus d’impact”, poursuit Elisa Badessi.
Ce n’est une surprise pour personne de constater que les transports sont le poste d’émission carbone le plus important – et cela l’est encore moins depuis la récente sortie du rapport “Décarbonons le sport” du Shift Project, faisant état de l’impact écologique du football et du rugby. Les déplacements représentent 36% des 18 700 tonnes de CO2 émis par la FFHandball en 2023. La faute aux multiples déplacements, parfois conséquents, de ses équipes de France, et de ceux générés par ses championnats nationaux et surtout par le public. Ces déplacements, nécessaires au fonctionnement des activités fédérales, sont particulièrement difficiles à réguler : 91% des émissions dues aux transports viennent du public.
La fédération envisage bien sûr de réduire ce poste, en axant sur la sensibilisation. “On n’est pas là pour contraindre le public à se déplacer de telle ou telle manière. On sait que le sport est un levier d’influence, donc si nous agissons sur les déplacements dont nous avons la charge, nous allons peut-être influencer les autres à en faire de même.”
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Les deux autres postes principaux d’émission de gaz à effet de serre sont les achats et les sponsors qui représentent respectivement, à parts quasi-égales, 30% et 29% du bilan carbone. La part des sponsors est directement liée aux activités des entreprises qui financent la FFHandball. Ainsi, le choix des partenaires de la fédération n’est pas sans conséquence, puisqu’elle donne de la visibilité à ces entreprises et à leurs activités, qu’elles soient écologiquement soutenables ou non.
Quant aux achats, afin de répondre au besoin de décarbonation, Elisa Badessi parle “d’une logique de réduction à suivre, en trois temps”. Le premier temps questionnera le véritable besoin de ces intrants. Pour ensuite penser une démarche d’optimisation “en mutualisant et en rationnalisant” les besoins matériels. Et enfin, troisième et dernier temps, de réfléchir à des alternatives plus vertueuses pour les besoins ne pouvant pas être substitués.
L’intelligence collective, une monnaie des plus importantes dans la transition
L’annonce de la réduction du budget alloué aux Sports par le Gouvernement français a fait couler beaucoup d’encre. Le risque est – entre autres – que cette baisse ralentisse la nécessaire transition écologique du sport. La Fédération Française de Handball s’était d’ailleurs mobilisée contre cette coupe budgétaire, laquelle soulève une contradiction majeure, selon Grégory Pradier, son directeur de l’administration générale et des salariés. “Ce qui est contrasté, c’est le fait de dire que le sport a des vertus, comme cela a été crié haut et fort en 2024, et de réduire son budget alors même qu’il y a un enjeu de santé publique, qui coûte bien plus cher à moyen et long terme“, argumente t-il, en distinguant bien la suppression des lignes budgétaires consacrées aux Jeux olympiques de Paris, de celles qui concernent des budgets qui n’y sont pas liés, et qui sont également réduits.
Si ces financements sont nécessaires à la transition des fédérations, dont celle de handball, Elisa Badessi rappelle tout de même qu’ils sont seulement “une partie de la question, mais tout n’est pas lié à l’argent. Notre démarche nécessite plutôt du temps, des ressources humaines et de l’énergie que de l’argent.” Ainsi, la FFHandball en appelle à l’engagement de nouveaux bénévoles, notamment des jeunes, qui sont des relais-clefs dans les différents strates de la fédération.
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Afin de rassembler autour du projet de décarbonation, Grégory Pradier rappelle l’importance de l’action pédagogique menée de front par la FFHandball et sa délégation de service public. La transition écologique n’est pas un combat solitaire, “il faut que tout le monde soit dans la boucle, et pour ça, il faut éduquer les gens et remettre en cause les matrices existantes. Il y a un travail de fond qui est très long.” Dans cette optique, Elisa Badessi et Grégory Pradier déploient notamment la sensibilisation par la formation des jeunes joueurs et des personnels aux Fresques du climat.
Cette “intelligence collective”, comme la nomme très justement l’apprentie RSE, est un espoir dans la réduction des émissions de CO2 générées par la fédération. Une réduction qui doit lui permettre de “se mettre en accord avec une potentielle future législation et de monter en compétences en attendant”, conclut Elisa Badessi. L’enjeu demeure maintenant de parvenir à transformer la stratégie en actions concrètes, afin de faire du handball français un modèle de pratique sportive durable et responsable.