Roland Jourdain est un homme aux multiples talents. Skipper professionnel émérite depuis plus de 30 ans, c’est aussi un entrepreneur « philanthrope » qui met ses connaissances et son expérience au service de l’innovation écologique.
Roland Jourdain, aussi connu sous le surnom de Bilou, est un sacré marin. 20 ans après sa première participation, il sera une nouvelle fois au départ de la Route du Rhum, le 6 novembre prochain à Saint-Malo. Les années passent et Bilou continue de vouloir chevaucher les océans, mais avec une certaine évolution. Souvent au départ pour gagner la course – il l’a d’ailleurs gagné 2 fois en 2006 et 2010 -, il le sera cette fois pour relever un défi : celui de montrer qu’il est possible de penser et naviguer autrement.
Le défi que se lance le skipper finistérien est dans la continuité d’un cheminement amorcé pendant le Vendée Globe 2008-2009. Lors de cette édition, après avoir passé le cap Horn en deuxième position, son bateau a heurté violemment un mammifère marin, ce qui a endommagé la quille et hypothéqué ses chances de victoire. Il prononcera ces mots : « Je ne peux pas en vouloir à une baleine, elle est sur son territoire. »
Un catamaran de 18 mètres composé à 50% de fibre de lin, une première mondiale
Ce n’est donc pas un hasard si, 5 ans après la création de son entreprise Kaïros – qui accompagne les skippers dans leurs projets -, Roland Jourdain créé le pôle Kaïros Environnement, spécialisé dans la recherche et le développement de biomatériaux innovants.
Cette double expertise de la voile de compétition et des biomatériaux a très vite poussé Bilou à essayer de construire des bateaux moins impactants, en utilisant notamment la fibre de lin, une fibre végétale 5 à 6 fois moins énergivore que la fibre de verre actuellement utilisée. Après plusieurs petits projets, Roland et son équipe ont décidé de changer d’échelle en construisant, en vue de la prochaine Route du Rhum We Explore, un catamaran de 18 mètres composé notamment d’un pont 100% en lin, dont la taille équivaut à celle d’un terrain de tennis. Une première mondiale.
Symbolique selon le skipper de la « sobriété heureuse », ce bateau est le fruit de la collaboration avec la coopérative Terre de Lin, fournisseuse de la fibre ; une collaboration qui mélange terre et mer, vert et bleu.
Un fonds de dotation afin d’encourager les initiatives positives pour l’homme et la planète
Kaïros, nom de l’entreprise de Roland Jourdain, signifie en grec « moment opportun ». Celui de Bilou est arrivé en 2013, année durant laquelle il a décidé de lancer un nouveau projet, le fonds Explore, dont l’objectif est « de développer de véritables solutions pour engager notre société dans un nouveau modèle où l’homme et la nature ont toute leur place. » Ce projet, le skipper-entrepreneur l’a amorcé en faisant un constat simple : « On a besoin de s’inspirer tous ensemble pour construire le monde de demain dont on parle tant. » Ce constat, aussi partagé soit-il, il l’a transformé en un projet concret, celui de son Fonds de dotation, qui accompagne depuis bientôt 10 ans de nombreux explorateurs qui « sont les bâtisseurs d’un monde réconcilié avec la nature et nous projettent de façon positive dans l’avenir », selon ses dires.
Plastic Odyssey, un des projets accompagnés, développe par exemple des technologies de recyclage du plastique, embarquées sur un navire-laboratoire parti de Dunkerque le 1er janvier 2022. Il va réaliser un tour du monde le long des côtes les plus polluées de la planète pour sensibiliser faire émerger des initiatives locales. Outre cet accompagnement de projets, Explore souhaite aussi sensibiliser et éduquer aux enjeux environnementaux via diverses formations, interventions, ateliers et conférences en ciblant notamment les jeunes qui construiront le monde de demain.
Roland Jourdain compare souvent la planète à un bateau, en soulignant que « l’équipage sur le bateau-planète-Terre augmente, mais que les ressources dans les cales diminuent ». Pour que le bateau continue à naviguer le plus longtemps possible, il faut échanger, s’inspirer, innover, entreprendre, accompagner… Et cela, Bilou y contribue formidablement.