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Claire Lepage (LNR) : « Ayons le courage de nous réinventer ! » – 1e partie

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La Ligue Nationale de Rugby est très active, ces dernières années, sur les sujets sociaux, sociétaux et environnementaux. Nous avons interrogé Claire Lepage, responsable RSE de la LNR depuis 2017. Ce long échange est divisé en deux parties : la première axée sur l’environnement, la seconde sur la RSE dans sa globalité.

Nous voyons la LNR très engagée sur les sujets sociaux et sociétaux ces derniers mois – nous y reviendrons dans la deuxième partie de cet entretien, mais travaille-t-elle aussi sur des projets environnementaux ?

Nous travaillons sur plusieurs choses. Jusqu’ici, nous travaillions beaucoup sur les achats, l’approvisionnement, les déchets, sur la base de la charte des 15 éco-engagements du Ministère des sports et du WWF, dont la LNR est signataire depuis 2017. Ce n’est pas très « sexy » et c’est difficile de communiquer là-dessus. Mais c’est important et ça nous a permis de nous structurer. Le plus important, c’est de garder le rôle de sensibilisation que l’on peut avoir. Nous suivons et sommes très suivis par les autres sports et par le Ministère sur ces sujets, afin de les faire avancer. Le rugby est le bon sport pour tester des actions car nous avons un public bienveillant et ouvert.

Dès les demi-finales 2018, à Lyon, nous avons pu mettre en place quelques petites actions : la mise en place de cendriers ou la gestion de déchets sur un ton plus ludique que le simple tri. L’année suivante, sur les demi-finales 2019 à Bordeaux, nous avons travaillé dès le début avec la Ville de Bordeaux sur la mise en place d’un plan vélo. Ce plan permettait aux supporters installés sur chacun des « villages » mis en place par la LNR en centre-ville d’aller au stade, qui se trouvait à 7km du centre, en mobilité douce. Nous ne voulions pas juste dire « prenez le vélo, c’est vraiment chouette », mais mettre en place et valoriser un projet concret de mobilité douce.

« Nous voulions que les gens n’aient pas l’impression de « faire de l’écologie », que c’était juste la normalité.« 

Et ça a été un succès ?

Ça a très bien fonctionné ! Nous avions bien communiqué dessus, mais nous avions aussi des parties prenantes très engagées. La Ville en avait aussi besoin, politiquement. Elle nous a mis à disposition une ancienne flotte de vélos de la métropole : une manière de donner une deuxième vie à ces véhicules !

La question que nous nous posions, c’était de savoir si notre public allait prendre ces vélos ou s’il allait garder ses habitudes… Il fallait donc rendre ça ludique et le faire entrer dans l’ambiance des phases finales de rugby. Nous avons fait un gros travail sur ça, en le marketant. Nous lui avons donné un nom , « Le TOP 14 à vélo » et l’avons animé en mettant des animations en place comme un beer-bike, où 16 personnes pédalaient sur les voies en buvant une bière pour aller au stade. Au delà de l’aspect environnemental, nous essayions de faire rentrer ça dans l’esprit rugby. Nous voulions que les gens n’aient pas l’impression de « faire de l’écologie », que c’était juste la normalité.

Le succès a été tel que Nice s’est montré intéressé pour reprendre le concept sur les demi-finales 2020, et nous l’avions même inclus dans la consultation que nous avons fait auprès des villes. Nice était très emballé par ce projet car la mobilité douce est une problématique de villes. C’est comme si nous venions la développer avec eux. Finalement, on peut, ensemble, progresser sur ces sujets. Ces projets, il faut les réaliser avec le bon état d’esprit. Il faut que le public ait toujours l’impression de venir voir un match de rugby, tout en expliquant que même s’il vient voir du rugby, il peut le faire de manière responsable et ludique.

Si un club décide d’accélérer sa transition écologique, quels bénéfices peuvent-ils en tirer ?

Il y a mille leviers économiques ! Quand nous parlons de développement durable, nous parlons d’abord d’une économie, qui prend en compte des critères sociaux et environnementaux. C’est une économie très peu court-termiste. C’est ce qui peut faire peur, car le retour sur investissement est plus long à mesurer. Un gestionnaire de stade, qui va travailler sur sa gestion de l’eau et des déchets, va gagner de l’argent à terme !

« Il semble que le partenariat années 80, où l’entreprise donnait son logo pour être visible va désormais faire place à un partenariat où l’engagement sociétal du sport et de l’entreprise sera valorisé. »

De plus, le sport en tant que reflet de la société, mais aussi les entreprises partenaires, doivent désormais prendre en compte ces sujets. Et ça tombe bien car nos supporters sont plus fiers d’un club précurseur et qui met en avant les volets sociaux et environnementaux, que d’un club qui n’a aucun engagement.

Il semble que le partenariat années 80, où l’entreprise donnait son logo pour être visible va désormais faire place à un partenariat où l’engagement sociétal du sport et de l’entreprise sera valorisé. Se dire qu’on peut être partenaire d’un club qui fait attention à l’environnement et qui est précurseur là-dessus ne peut qu’être valorisant. Quand la LNR va voir ses partenaires et parle de ses engagements sociétaux, de ce qu’elle fait sur la limitation de l’empreinte environnementale et la valorisation de son impact social, ce sont des thèmes sur lesquels nos partenaires sont extrêmement réceptifs.

LNR - Le TOP 14 à vélo - Ecolosport

Cette transition écologique, c’est aussi le devoir des municipalités, des communautés de communes, etc. Si un club est valeur d’exemple sur son territoire, c’est aussi plus facile d’avoir une subvention auprès de ces collectivités grâce à ces projets, que d’obtenir les subventions annuelles plus « classiques », qui tendent à disparaitre. Quand on est pionnier et qu’on avance au rythme de la société, plutôt que de vouloir le rattraper, c’est là que c’est le plus viable économiquement.

« Les gens sont fiers de suivre quelqu’un qui ne pense pas qu’à lui, qui montre un peu d’altruisme. »

À l’image des clubs, les sportifs s’engagent beaucoup sur les volets sociaux et sociétaux aujourd’hui, beaucoup moins sur l’environnement…

Entre un joueur qui joue bien et un joueur qui joue bien et qui est engagé, il y a une sacrée différence. L’image du joueur engagé est plus humaine, plus proche et plus sympathique. Il passe presque de joueur à influenceur. Les clubs et les joueurs ont un devoir d’exemplarité. Ça ne veut pas dire qu’il faut être parfait. Nous pouvons le faire de manière très humble en montrant que nous faisons quelque chose à notre échelle et que nous sommes fiers de le faire. Si un club met une action en place, le meilleur vecteur de communication, ce sont les joueurs ! C’est du gagnant-gagnant.

LNR - Le TOP 14 à vélo - Ecolosport
La LNR s’engage sur la mobilité douce lors des demi-finales de TOP 14

Il est logique, depuis longtemps et pour beaucoup de clubs, de dire à leurs joueurs d’aller une fois par an dans des hôpitaux ou des maisons de retraite par exemple. De la même manière, il sera logique dans quelques temps de dire à ses joueurs d’aller une fois dans l’année nettoyer une plage ou d’aller aider un agriculteur de son territoire, par exemple. Ce sera forcément beaucoup mieux si c’est un joueur qui en parle, plutôt qu’une institution. Le message passera beaucoup mieux. Et puis, c’est hyper valorisant pour le joueur. La valeur d’exemple, c’est la base, pour moi.

Dès que la LNR publie une action solidaire, positive, le compteur de likes explose, c’est dingue. Ainsi, les gens sont fiers de suivre quelqu’un qui ne pense pas qu’à lui, qui montre un peu d’altruisme. C’est pourquoi il faut garder en tête que quand nous parlons d’écologie, nous devons faire en sorte que le message reste positif et ludique. Ayons le courage de nous réinventer !

Découvrez la seconde partie de cet entretien : Claire Lepage (LNR) : « Le sport, vecteur fort de sensibilisation » (2e partie)

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Michaël Ferrisi

Ecolosport le PODDCAST explore la façon dont le sport peut contribuer à la réalisation des 17 Objectifs de Développement Durable (ODD) de l'ONU et comment ceux-ci peuvent soutenir le développement du sport.