Joueuse du Stade Français et du XV de France, Lénaïg Corson est aussi très engagée dans la protection de l’environnement. Un engagement accentué par le confinement passé dans sa famille, en Bretagne. La 2ème ligne aux 29 sélections nous en parle.
Lénaïg Corson, vous êtes très engagée dans la protection de notre environnement. Est-ce que vous pouvez nous en parler, nous dire d’où viennent ces convictions ?
J’ai envie de me rendre utile pour la planète ! C’est un sentiment que j’avais déjà auparavant et qui s’est accentué durant le confinement, que j’ai passé chez mes parents en Bretagne. Durant ces semaines de confinement, j’ai fait une vraie introspection, un point sur mes futurs projets. J’ai eu la chance de passer ce confinement dans la nature, à 500m d’une rivière où j’ai pu me balader, et où j’ai ramassé de nombreux déchets. Je vis normalement à Paris et j’ai redécouvert la vie à la campagne, le plaisir d’aller sur le marché bio de mon village. La vallée du Leguer est magnifique car des hommes et des femmes se sont battus pour la préserver. Mon père a justement fait partie de ceux qui l’ont protégé.
Mes parents sont très engagés dans le respect de l’environnement. Ils n’ont par exemple pas attendu les bacs jaunes pour trier, ils le font depuis toujours. Ils m’ont fait prendre conscience que nous n’avions qu’une seule planète et qu’il fallait la préserver. Dans la continuité des choses, je cherche aussi à protéger mon environnement. La semaine dernière, j’ai, par exemple, essayé de préserver la rivière à côté de chez moi en arrachant une plante invasive, la balsamine de l’Himalaya. Durant ce confinement, j’ai retrouvé goût à l’essentiel, à ce qui compte le plus dans ma vie : ma famille, se retrouver en harmonie avec la nature, les animaux. Je sens que la dynamique générale va dans ce sens-là, aujourd’hui.
Vous êtes aussi engagé dans l’association Be Green Ocean…
Oui ! C’est l’association de la nageuse Coralie Balmy. J’ai rencontré Coralie via Adidas, notre sponsor commun. Elle m’a parlé de son association et de ses missions. Par exemple, Be Green Ocean organise des journées de ramassage de déchets. J’ai expliqué à Coralie que je portais ces mêmes valeurs de respect de l’environnement, celles que mes parents m’avaient transmises. Ils habitent à quelques kilomètres de la mer, à côté de la Côte de Granit Rose. Je suis donc concernée par la protection des mers et des océans. Je suis d’ailleurs aussi engagée auprès de l’association de la Côte de Granit Rose Respect et Protection. Nous essayons, pour sa protection, de l’inscrire au patrimoine mondial de l’humanité par l’Unesco.
J’ai une anecdote, d’ailleurs. Je me baladais en bord de mer et j’ai vu une petite bouteille en verre posée par terre. Je me suis dit que j’allais la récupérer au retour. A mon retour, quelques minutes après, je vois un jeune garçon en train de faire tomber cette petite bouteille. J’ai donc été ramasser cette bouteille tombée et je suis allé voir ce garçon pour lui expliquer. J’ai essayé de le sermonner en lui faisant prendre conscience des enjeux, en lui expliquant que l’endroit où il aime passer ses vacances, s’il y a plein de déchets partout, il n’aimera plus y venir. Il fallait qu’il respecte ça. Je ne sais pas si mon discours a eu un impact, mais il ne faisait pas le fier. Plutôt que de l’engueuler, j’ai plutôt essayé de lui faire prendre conscience que nous n’avons qu’une seule planète, et qu’il faut en prendre soin… Et prendre des morceaux de verre dans les pieds, ça fait mal ! (rires)
On vous a justement vu récemment, sur Twitter, interpeller vos abonnés à ne pas jeter leurs déchets et les municipalités du littoral breton à mettre davantage de poubelles… Sur Instagram aussi, vous partagez dans vos stories vos astuces ou des messages à vos abonnés. C’est important d’en parler aux fans et aux plus jeunes ?
J’ai longuement hésité à le faire, car j’avais l’impression de sortir de mon rôle de joueuse. Puis, je me suis dit que nous n’étions pas cantonné qu’à faire du rugby. Nous sommes des sportifs avec des centres d’intérêts. Pour certains, ça peut être l’art, pour moi c’est la protection de l’environnement !
Je suis sensibilisée à ça depuis que je suis toute petite, mais je suis loin d’être parfaite ! Je ne le suis pas car je traine encore un peu trop sous la douche, car je prends ma voiture sur le périphérique parisien, car j’achète encore aujourd’hui des produits avec de l’emballage plastique. C’est voué à évoluer, bien sûr. J’essaye d’être le plus « zéro déchets » possible, d’aller faire mes courses avec des bocaux.
Mon objectif, même si je ne suis pas parfaite, est d’en parler davantage pour faire évoluer les choses dans le bon sens. Nous n’y arriverons pas tout seul, ça doit être une prise de conscience collective. En mettant bout-à-bout des petites actions, nous pouvons faire de grandes choses. Grâce aux réseaux sociaux, nous pouvons toucher beaucoup de personnes. J’espère toucher les plus jeunes, les sensibiliser. Je sens aussi un vrai soutien de ceux qui me suivent.
N’est-ce pas aussi le rôle du sportif, justement ? Divertir ses fans, bien sûr, mais aussi les sensibiliser sur des messages de société ?
Bien sûr, mais il ne faut pas se perdre… Nous sommes là pour jouer au rugby, représenter notre sport. Dans le rugby féminin surtout, nous avons besoin des joueuses pour représenter notre sport, que les gens arrêtent d’avoir un à priori sur le rugby féminin. Notre enjeu sociétal, c’est de faire prendre conscience au public que les filles peuvent jour au rugby, que nous ne sommes pas forcément des grandes costaudes « bourrines ». Nous pouvons être des joueuses féminines, qui avons des centres d’intérêt autres que le rugby.
Nous avons ce rôle-là, d’éveiller les consciences. Le mouvement Black lives matter sur les réseaux sociaux est génial. Quand on voit qu’à l’INSEP, les visages de nos sportifs et champions noirs ont été tagués, c’est inacceptable ! La jeune génération doit être sensibilisée à ça. Le racisme ne doit plus exister aujourd’hui. Comme pour l’environnement, jeter un déchet par terre ne doit plus exister aujourd’hui. Si demain, sur Instagram, nous pouvions toutes et tous mettre un fond vert comme cela a été fait pour le Black lives matter avec la diffusion de fonds noirs, ce serait génial, ça éveillerait les consciences ! Mais je pense que nous n’en sommes pas encore là, malheureusement.
Je suis aussi engagée auprès de Zéro Waste France, une association qui lutte pour le « zéro déchets ». Je prends aussi conscience que je suis très enthousiaste à l’idée d’en parler. Après ma carrière de rugby, j’ai envie de me sentir utile. C’est dur de se reconvertir après une carrière de rugby. Il faut que je trouve un métier qui me passionne. Le sujet qui me passionne, je l’ai, là, devant mes yeux. Dans mon futur métier, je veux m’investir pour l’environnement.
Vous faites parti du Stade Français Paris et de l’équipe de France de rugby. Que doivent faire les clubs de rugby et la FFR pour être plus éco-responsable ?
En premier lieu, j’interpelle les joueurs et les joueuses de rugby sur les bouteilles d’eau en plastique ! C’est un réel problème… Le nombre de fois où je suis sortie du terrain en voyant plusieurs bouteilles en plastique joncher le sol… Aujourd’hui, j’ai pris le réflexe de prendre ma gourde et de la remplir à la maison.
Dans le milieu du sport, il y a tellement de choses à faire… Justement, j’ai eu une formation avec Zéro Waste France sur les impacts et les démarches à faire lors d’un événement sportif. Il y a plein d’idées pour associer écologie et événement sportif. Il faut qu’un maximum de parties prenantes soient au courant de ce qui peut être mis en place. Les associations sportives et organisateurs d’événements sportifs peuvent avoir des clés pour être plus éco-responsables : ça peut être les Ecocup – j’en ai d’ailleurs parlé avec Julien Pierre ; ne plus avoir de t-shirts par événement mais en avoir des non-datés que nous pouvons utiliser sur plusieurs événements ; distribuer des récompenses éco-responsables, moins gadgets etc…
L’association Zero Waste a d’ailleurs sorti un guide pour rendre son événement sportif zéro déchets !