Après la récente décision de l’athlète britannique Innes Fitzgerald de ne pas participer à une compétition en Australie pour raisons écologiques, le navigateur Stan Thuret vient de faire un choix très fort pour le même motif, celui d’arrêter purement et simplement la course au large. Dans un long message Instagram teinté d’émotions où le participant à la dernière Route du Rhum s’exprime à cœur ouvert, il n’hésite pas à faire un constat lucide sur l’impact de sa discipline sur l’environnement.
« Aujourd’hui, je n’ai plus envie de compétition sans limite à la performance, car c’est un non-sens total, car le prix à payer est lourd, et je ne veux plus être tiraillé entre dire qu’il faut changer et ne pas changer moi-même. » À travers ce long texte, Stan Thuret, co-fondateur de l’association La Vague n’hésite pas à dénoncer le côté élitiste et individualiste de la voile, comparant les participants à des enfants gâtés « complètement déconnectés de la réalité sociale et environnementale ». La recherche continue de la performance ajoutée aux enjeux commerciaux poussent probablement l’individualisme à son paroxysme. Une vision à l’opposé de celle de Stan et de la plupart des personnes conscientes que la meilleure réponse au défi climatique se base sur le collectif et la sobriété.
Le reflet de notre société
On peut donc facilement faire un parallèle avec notre société de surconsommation ultra-connectée, que le jeune homme de 35 ans évoque justement. « Les réseaux sociaux, où se construisent désormais nos rêves et nos envies, nous enferment trop souvent à vouloir copier ce que nous propose la norme actuelle, pour mieux nous contrôler, nous comparer et nous rendre triste. »
Il en profite également pour faire un point sur la situation planétaire et pour rappeler « qu’on ne va pas dans la bonne direction » car « l’urgence climatique est là ». L’inertie générale est, à juste titre, pointée du doigt dans ce discours. « Tout le monde se regarde, et personne n’agit véritablement et nous sommes très loin d’être à la hauteur des enjeux ».
Une note d’optimisme
Malgré ce gros changement de cap et le contexte de crise climatique, Stan Thuret veut rester positif car comme il le dit si bien, « la finalité c’est le bonheur ». « Je veux aller chercher ça ailleurs que dans ce que l’on veut nous vendre artistiquement, sportivement, économiquement et socialement depuis qu’on est tout petit. À nous de réinventer de la joie, de la vie et du collectif. »
La simplicité et la sobriété sont les maître-mots du nouveau chapitre de sa vie. Une solution ? « Aller vers la beauté, vers la simplicité, se reconnecter, c’est la seule chose qui peut encore nous sauver. » Il reste cependant lucide sur le fait qu’il appartient encore à une minorité, celle des « éco-réalistes. » Tout en étant critique du monde de la voile, le Fouesnantais reste reconnaissant de ce que lui a apporté son sport et ne veux pas « casser les rêves de ceux qui aspirent au large ». Il espère même rassembler les amoureux(se)s de la mer, et bien plus, pour « montrer que d’autres imaginaires sont possibles ».
Et quelle meilleure conclusion que celle de ce discours, pouvant s’adapter à toute autre discipline sportive, invitant au renouveau de notre société et de nos modes de vie. « Les choix que nous faisons aujourd’hui nous laissent deux options : soit on casse le futur, soit on commence à réparer. Faire mieux, avec moins, ensemble, sur une expédition artistique engagée. »
Photo à la une : © Cécile Hoynant