“Le monde du sport face à l’urgence écologique”, aux éditions La Plage, est un recueil d’inspiration pour celles et ceux qui souhaitent faire bouger les lignes. À travers les récits d’acteur(e)s du mouvement sportif, elles et ils réinterrogent collectivement les notions de performance, les valeurs du sport et le modèle capitaliste pour “dépasser la logique des “petits gestes””. Petit tour d’horizon des prises de parole avec Ecolosport.
Les récits de vie et d’engagement du livre “Le monde du sport face à l’urgence écologique” passent en revue les enjeux climatiques du sport. S’entendant sur les raisons, les intervenant(e)s s’attachent à “partager des parcours de vie où l’urgence écologique a fait son apparition au milieu de cette passion pour le sport”. Face aux enjeux planétaires, le sport, “autrefois considéré comme un simple divertissement, […] est devenu aujourd’hui un véritable phénomène économique mondial”. Un objet d’étude central car comme il est rappelé, il est “inutile à notre survie, mais paradoxalement, il est très utile à notre vie”.
La place des sportifs dans la société
Le panel affirme la place prépondérante dans la société des sportif(ve)s. Dans un monde où le sport s’est imposé comme vecteur de valeurs, elles et ils revendiquent le rôle politique des athlètes.
Nolwen Berthier, marraine de cet ouvrage et ancienne grimpeuse de l’équipe de France, explique l’indispensable nécessité “de couper avec ces imaginaires dont on a hérité, que ce soit par notre éducation ou le milieu dans lequel on évolue”. Isabelle Autissier, première femme à réaliser un tour du monde en solitaire, montre aussi la portée du monde sportif face aux enjeux environnementaux. Pour elle, le monde du sport est encore hermétique à ces enjeux de survie car “seule la quête de la performance semble compter”. Un constat partagé par Stan Thuret, cinéaste-navigateur, suite à sa prise de conscience. Dans le milieu de la voile, il s’est confronté à la résistance du système face au changement avec son association La Vague et témoigne : “Nous tentons de transformer un milieu qui refuse de changer”.
Quant au sprinteur Younès Nezar, il fait le lien entre le sport et la santé mais défend également l’idée de la place prépondérante des sportif(ve)s grâce à son association, les Climatosportifs. Finalement, Xavier Thévenard, ultratrailer, se confie sur l’évolution du trail et son rôle en tant que sportif de haut niveau très médiatisé. Il souhaite faire prendre conscience du décalage qui existe avec le modèle de société actuel et faire changer les mentalités sur ce sport qui d’origine se voulait connecté avec la nature.
L’organisation complète des modèles préexistants
Dans cet ouvrage, il ne s’agit pas aussi d’évoluer en silo mais bien d’agir collectivement, de manière structurelle. Le rôle des médias est primordial comme le rappelle Clothilde Sauvages, cofondatrice de Vent Debout, et nous invite à réfléchir à “la manière dont nous pensons le sport [car cela] a des conséquences sur notre société”.
Cette invitation est partagée par les organisations qui font vivre le sport à travers le territoire. À l’instar de Gérard Rougier, directeur territoires et environnement de la Fédération Française de Golf, qui a su initier des changements et engager des efforts au sein de la fédération. Cependant, il déplore qu’“aujourd’hui, il n’y a pas encore de moyens suffisants au niveau de l’État pour que notre sport ne soit pas menacé”.
Ce que prône Olivier Errard, ingénieur des mines de Saint-Étienne spécialisé en glaciologie, est une réflexion sur le long terme et holistique. À la fois, sur le modèle économique, touristique, sportif mais aussi aux prévisions météorologiques pour le ski alpin. Aujourd’hui, des territoires dépendent presque entièrement sur une économie touristique hivernale, ce qui questionne sur leur avenir dans un monde qui se réchauffe. Il défend alors que “pour conserver une économie touristique viable, il fallait penser au-delà du périmètre de la station et travailler à l’échelle du territoire”.
D’un autre côté, certaines entreprises initient des transformations internes dans des milieux concurrentiels, comme celui de l’équipement. Millet Mountain Group est l’une de ces entreprises qui redéfinissent leur stratégie de transition pour être soutenables à 100 ans. Des transitions qui demandent du temps et qui suscitent des débats car “deux modèles cohabitent au sein de l’entreprise : l’un repose sur la croissance volumique, et l’autre sur sa robustesse”. Bénédicte Desreux, responsable RSE, explique clairement : “Tant que n’aurons pas entièrement bifurqué, ces deux modèles continueront à coexister au sein de l’entreprise, avec les incohérences qu’une telle situation implique”.
Enfin, la bifurcation de modèle actuel d’organisation du sport est indiscutable pour Stéphane Passeron, porte-parole du collectif NO JO ! “La situation nous oblige à la radicalité”. Un cri d’alerte pour décider ensemble des directions à venir, qui détermineront l’avenir des prochaines générations.
Finalement, les neuf intervenant(e)s, de sensibilités diverses, convergent vers une même conclusion : il faut organiser collectivement et “dessiner les contours des transformations radicales des modes de production et de consommation dont nous avons besoin”.
> “Le monde du sport face à l’urgence écologique”, aux éditions La Plage, disponible ici.