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TRIBUNE – La renaissance du mouvement sportif : vers un modèle de sobriété heureuse ?

François Singer Ecolosport
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Chaque mois, François Singer, Purpose Partnerships Manager chez 17 Sport, proposera  sur Ecolosport une tribune sur un des nombreux sujets qui lient l’éco-responsabilité au sport.

François Singer nous parle ce mois-ci de la renaissance du mouvement sportif, qui doit tendre vers un modèle de sobriété.

Depuis plusieurs décennies, nos méthodes de production et de consommation reposent sur des acquis de la révolution industrielle. Elles s’inscrivent dans un système économique fondé sur la recherche permanente de profit, dans une croyance que notre croissance peut être exponentielle indéfiniment alors que notre monde est, lui, fini en ressources.

Ce système de recherche perpétuelle de croissance, relayé par un grand nombre d’acteurs de l’éco-système sportif, est ainsi à l’origine de la croissance de l’empreinte écologique et de la pression orchestrée sur la biodiversité.

Le sport, s’il ne repense pas ses modèles économiques s’agissant aussi bien du sport amateur et de loisir (gestion et exploitation des équipements, emplois, licences…) que du sport professionnel (marchandisation, mobilité, approvisionnement…), continuera dès lors à participer à la destruction irrémédiable des ressources de notre planète et au réchauffement incontrôlé de celle-ci.

L’émergence de nouveaux modèles 

D’autres modèles économiques existent pourtant et participent à l’émergence d’un nouveau monde. Les acteurs de l’économie circulaire par exemple qui sollicitent la transformation des déchets en ressources ont amorcés ce changement depuis quelques années. Dans la continuité de cette démarche durable, des chartes d’engagement éco-responsables, sociales et solidaires se déploient au sein d’organisations, d’associations, de clubs, de fédérations (WWF, Toulouse Business Club, Brainup…). Des labels d’éco-responsabilité sont également intégrés au sein du mouvement sportif (Fair Play for the Planet, Fondation Relais Vert…)

Photo : Braden Collum / Unsplash

Toutes ces actions accompagnent la transformation du mouvement sportif et repensent l’essence même du rôle des organisations sportives. Certaines chartes se structurent par ailleurs bien souvent autour de domaines d’actions et de mesures concrètes.

  • Autour de la gestion globale tout d’abord

L’implication de la gouvernance, des salariés, des bénévoles, des athlètes est bien sur essentielle et doit permettre de garantir l’efficacité de la démarche ainsi que la qualité et la cohérence des actions. Qui dit gestion globale, dit également gestion financière et donc gestion des flux de comptabilité. Le reporting extra-financier des entreprises a permis de mieux comprendre les impacts de nos entreprises mais il n’a pas permis de les réduire significativement.

Des propositions et sources de financement de la transition écologique sont d’ailleurs proposées par des organismes comme The Shift Project ou Carbone 4. L’objectif étant véritablement de lier global et local pour financer cette transition vers le monde d’après

De même, le développement du statut des coopératives dont les membres associés détiennent au moins une part au sein des structures est également une piste sérieuse. Parmi ces dernières, deux types de coopératives sont d’ailleurs régulièrement privilégiés par les acteurs de l’économie sociale et solidaire pour organiser leurs activités : les Scop (société coopérative et participative) et les Scic (sociétés coopératives d’intérêt collectif).

  • Autour de l’optimisation des mobilités douces et actives

Il est nécessaire de repenser nos déplacements à travers une démarche d’éco-mobilité en privilégiant les transports collectifs (bus, tramway, métro, train) et les modes partagés (vélos en libre-service, autopartage, covoiturage). Pour rappel une voiture individuelle est en moyenne à l’arrêt 96% du temps… Ces principes s’appliquent aussi bien pour le sport amateur que pour le sport professionnel qui se doit d’être d’autant plus exemplaire sur ces enjeux écologiques. Faire voyager certaines équipes professionnelles en avion sur de très courtes distances est une aberration environnementale.

L’enjeu de la démocratisation des mobilités douces et actives va même plus loin et participe à la dé-sédentarisation de la population. Son usage est un enjeu de santé public humainement et financièrement non négligeable. Pour rappel au sein de l’Union européenne, l’inactivité physique a un coût médical de 87 milliards d’euros par an. Il faut donc continuer à promouvoir l’effort sportif sous toutes ses formes.

  • Autour de la gestion des déchets

Les acteurs du mouvement sportif se doivent de participer plus activement à la collecte, au tri et au traitement des déchets (aussi appelés « ressources non utilisées » selon la nomenclature de l’économie circulaire).

Selon l’ADEME, notre production de déchets a doublé en 40 ans. Ainsi, en France, chaque citoyen produit en moyenne 590 kg de déchets par an. Le Grenelle de l’Environnement fixe comme objectif le recyclage de 50% des déchets produits d’ici fin 2021 alors que la Mairie de Paris souhaite quant-à elle, bannir totalement le plastique jetable à horizon 2024. N’oublions pas que le meilleur déchet est celui que nous ne produisons pas. Ainsi, la prévention et le réemploi sont des enjeux forts d’une politique de gestion des déchets au sein du secteur sportif

L’implication du supporter, du fan, dans ces actions éco-citoyennes de tri et de recyclage est plus que jamais nécessaire. Les spectateurs sont les vecteurs incontournables d’un sport populaire et solidaire. La vitalité d’un sport français éco-responsable passe donc aussi par ces acteurs.

Photo : Emma Dau
  • Autour de la gestion de l’alimentation

En adoptant une alimentation éco-responsable également les acteurs du mouvement sportif peuvent agir et se responsabiliser pour réduire l’impact environnemental : valorisation du local, mise en place de circuits courts, lutte contre le gaspillage alimentaire, redistribution de denrées auprès des associations, certification des systèmes d’approvisionnement… Plus d’un tiers de la production alimentaire mondiale est actuellement gaspillée avant même d’arriver dans nos assiettes. Pour illustrer concrètement ce propos, certains salons VIP de grandes organisations sportives proposaient encore récemment jusqu’à 1,4 kg de nourriture par personne et par repas…

Exploiter le pouvoir de la pression sociale est également un moyen efficace pour sensibiliser et susciter chez les consommateurs des comportements écologiquement vertueux. Celui de préciser par exemple aux clients d’un buffet que la règle était de ne pas prendre trop à la fois (et qu’il était permis de venir se resservir par la suite) a permis de réduire le gaspillage alimentaire de 20%.

  • Autour de la responsabilisation et sensibilisation de l’écosystème sportif

A première vue, pour une organisation sportive, le moment n’a apparemment jamais été aussi propice pour lancer une offre durable. Les « consom’acteurs », et en particulier les millennials, déclarent ainsi qu’ils veulent des marques engagées dans la défense de l’environnement. Certaines catégories de produits qui mettent en avant un caractère durable semblent même voir leur part de marché augmenter deux fois plus que leurs équivalents traditionnels. Le fait de dire aux clients des sites de vente en ligne que d’autres personnes achètent des produits écologiques a conduit à une augmentation de 65% des commandes incluant au moins un produit dit durable.

Le sportif, l’athlète, doit être également sensibilisé afin de pouvoir transmettre « la bonne parole » à son tour. Le sensibiliser aux enjeux du développement durable pendant et en dehors de son activité professionnelle lui donnera les moyens de ressentir davantage de cohérence entre ses convictions, ses valeurs personnelles et son activité professionnelle.

Il faut développer selon moi la notion d’EcoAthlètes. Les EcoAthletes doivent avoir pour objectif d’identifier les enjeux de développement durable, d’inspirer, d’ouvrir les consciences en parlant régulièrement des conséquences du réchauffement climatique. L’année dernière Cristiano Ronaldo, suivi par 210 M de personnes sur Instagram a effectué un post relayant un contenu officiel de l’OMS. Ce post de prévention contre le Coronavirus a généré plus de 2.8 Millions de likes et près de 20 000 commentaires soit 40 fois plus d’engagement que le compte officiel de l’OMS pour un coût d’investissement quasiment nul.

  • Autour de la gestion de l’énergie

Les équipements sportifs via leur construction ou leur rénovation vont devoir désormais répondre de façon cohérente aux contraintes environnementales. L’intégration d’énergies renouvelables (béton bas carbone, hydrogène, flotte de véhicules électriques) s’inscrit dans la démarche d’une économie circulaire durable.

Les bâtiments représentent près de 44% de la consommation d’énergie finale de la France. Au-delà de l’enjeu climatique, l’optimisation des consommations d’énergie est une véritable nécessité économique pour les acteurs du mouvement sportif. La FFT via la certification BREEAM ( Building Research Establishment Environmental Assessment Method ) en partenariat avec Engie l’a bien intégré dans la rénovation de Roland Garros par exemple. La méthode d’évaluation de la performance environnementale des bâtiments doit donc être adoptée par l’ensemble du secteur sportif.

Autre chiffre impactant, les bâtiments -hors logement- ne sont utilisés en moyenne que 25% du temps. La marge d’amélioration est donc énorme pour l’ensemble du secteur. Chez Bouygues par exemple, le concept BHEP (Bâtiment Hybride à Économie Positive), tend à démontrer que certaines parties des bâtiments (non utilisées 75% du temps) peuvent être mises à la disposition d’autres entités pour d’autres usages. Ces solutions sont à notre portée d’un point de vue technologique et rentables d’un point de vue économique ; le mètre carré le moins cher étant celui qu’on ne construit pas. Le chantier de la rénovation au sein du secteur sportif est donc colossal.

  • Autour de l’inclusion des territoires

Il faut mettre l’accent sur le local, sur les villes et sur les territoires qui engendreront la construction de poches de résilience et qui formeront progressivement un maillage territorial de plus en plus dense. Le label terre de Jeux du Comité d’Organisation Paris 2024 par exemple rend compte du pouvoir territorial et de l’importance des collectivités locales en matière de développement sportif.

Il faut maintenant agir et montrer que des solutions existent, qu’elles fonctionnent. Il faut les rendre désirables. Il faut montrer qu’il existe des modèles économiques qui, même s’ils sont moins rentables que les anciens modèles, permettent de réinvestir et ainsi d’accélérer le développement de ces solutions sur les territoires. C’est donc une approche exclusivement par l’action qui semble être la bonne stratégie à suivre. Le sport et les activités physiques, au travers de leurs actions de développement au sein des territoires, donnent vie aux principes de solidarité et d’émancipation collective.

Purpose François Singer Ecolosport
François Singer

Le Monde d’après est en marche

La nécessité de limiter notre impact sur l’environnement est maintenant une réalité bien admise. Si cette réalité s’impose à nous, elle n’est pas synonyme de renoncement et d’austérité mais appelle à inventer une nouvelle manière de vivre.

Il faudra bien sûr que les modèles économiques poursuivent leurs transformations. Il faudra passer de l’économie de la fonctionnalité à l’économie collaborative, de l’économie de l’entre-soi à l’économie de la circularité, de l’High Tech au Low Tech. Il faudra passer d’une stratégie de possession à une stratégie d’échange. Il faudra que le mouvement sportif ne perde pas de vue une rapide transition vers un modèle plus durable et équitable afin d’éviter de futurs écueils économiques et environnementaux. Enfin il faudra bien sûr que l’ensemble des acteurs du mouvement sportif puisse aligner leurs stratégies avec les 17 Objectifs de développement Durables des Nations Unies.

Au minimum, le sport doit s’adapter à ces transformations de fond ; mieux encore, il doit repenser sa philosophie, ses fonctions, ses objectifs, sa gouvernance, son management et innover en termes de matériel et d’équipements.

Le temps est donc venu, ensemble, de poser les premières pierres d’un monde sportif nouveau. Le temps est venu d’adopter une nouvelle façon de penser, plus lucide. Il ne s’agit plus de sacrifier le futur au présent mais de dresser un horizon commun en résistant à la fatalité.

Le sport a cette force. Et plus que jamais, il aura sans nul doute un rôle significatif à jouer dans l’avènement du monde d’après. Le mouvement sportif peut être un formidable moteur de la réinvention du « comment vivre heureux » tout en étant beaucoup plus sobre qu’aujourd’hui.

Oui le sport contributif, porteur de sens, est en marche.

Place à l’action !

François Singer


17 Sport est la première entreprise d’impact au monde opérant à l’intersection du sport, du business et du purpose. 17 Sport a été créé afin d’accélérer la transformation du secteur du sport au service d’un futur durable, en accord avec les 17 Objectifs de Développement Durable fixés par l’ONU. 17 Sport propose des solutions de conseil en stratégie ‘purpose’, de commercialisation et d’activation auprès des acteurs du sport (athlètes, marques, événements, institutions, ONG), permettant de générer des retombées positives d’un point de vue financier, social et environnemental.
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Ecolosport le PODDCAST explore la façon dont le sport peut contribuer à la réalisation des 17 Objectifs de Développement Durable (ODD) de l'ONU et comment ceux-ci peuvent soutenir le développement du sport.