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L’Equipière, la recette gagnante d’une ressourcerie sportive

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Basée à Rennes, L’Equipière est la première ressourcerie sportive en France. Créée par Estel Rubeillon il y a deux ans, elle donne une seconde vie au matériel sportif. Entretien.

Il y a deux ans, dos au mur face aux restrictions mondiales liées à la crise du COVID-19, nous prenions tous – ou presque – conscience que notre mode de consommation avait ses limites. L’urgence nous obligeait à adapter notre quotidien et plus largement à faire évoluer notre société vers un modèle plus durable. En mars 2020, souvenez-vous, comme un retour aux sources, se fournir à l’échelle locale n’était plus considéré comme étant « bobo » mais devenait une nécessité face aux échanges internationaux limités sur nos produits de la vie quotidienne. C’est en partie grâce à cela que nous pouvons aujourd’hui vous emmener à la rencontre d’Estel Rubeillon, une entrepreneuse qui a décidé de se lancer dans un projet de ressourcerie sportive inédit appelé L’Equipière.

Estel, sans plus attendre, pourriez-vous nous éclairer sur ce qui différencie L’Equipière d’une recyclerie sportive, et quelles ont été vos inspirations et motivations à l’origine de la création de cette ressourcerie pas comme les autres ?

Estel Rubeillon : La « recyclerie sportive » est une marque déposée – pensée par Marc Bultez à Paris – et ne peut techniquement pas être utilisée. Sans pour autant être complètement différente, notre modèle organisationnel n’a pas été imaginé de la même façon que le leur. A L’Equipière, nous nous sommes engagés sur le terme de « ressourcerie sportive », qui vise aussi à transformer l’objet dit « déchet » en ressource, mais où il deviendra une ressource financière créatrice d’emploi et qui pourra redonner à cet objet une seconde vie. C’est là que ça aura plus de sens.

Très clairement, me lancer dans ce projet était pour moi l’occasion d’allier mes aspirations personnelles et professionnelles, et de leur donner une certaine envergure. Cela s’est donc traduit par mon envie de m’engager dans un projet environnemental fort et d’y mêler ma passion pour le sport. D’une certaine manière, je dirais même que c’est un projet à mon image, c’est-à-dire que j’ai pu mettre un peu tout ce qui me plaisait dedans. Enfin pas encore tout, nous n’en sommes qu’au début (sourire).

Ce mélange d’aspirations et de quête de sens a pu vous mener à la réalisation de ce projet, et donc à utiliser ce terme inédit de ressourcerie sportive. Quelles sont les caractéristiques qui le rendent unique ?

Estel Rubeillon : Un exemple me vient à l’esprit et date du week-end dernier, où nous avons travaillé avec l’ensemble des membres du conseil d’administration sur notre définition de la gouvernance et donc de notre feuille de route. Je peux donc vous dire que notre modèle est notre atout numéro 1. Celui-ci consiste à créer une nouvelle forme de conscience auprès de l’industrie sportive et nous l’espérons, à l’avenir, de devenir une référence sur notre territoire. Être considéré comme un lieu ressource, c’est à la fois incarner un modèle de consommation radicalement opposé à celui actuel ainsi qu’un modèle d’organisation plus durable et certainement moins hiérarchisé. Rayonner et stimuler les dynamiques locales peut, tout compte fait, être la caractéristique qui nous rendra uniques et inspirants autant auprès des particuliers que des géants industriels.

Vous avez pour cette année 2022, un plan organisationnel qui tend à devenir un projet collectif, et vous n’hésitez pas à le mettre en avant sur vos réseaux sociaux. Pouvez-vous nous en dire plus sur cette marche à suivre ?

Estel Rubeillon : Nous concrétisons ce projet par la constitution d’une équipe projet qui se met en place petit à petit. Je suis actuellement la seule salariée, mais suis accompagnée par Mélanie, coordinatrice projet et bénévole présente à temps partiel, et Élise, volontaire en service civique qui sera embauchée à partir de septembre. La place accordée aux volontaires en service civique est tout simplement liée à mon passé dans le champ de la formation. Il y a, selon moi, un devoir de la part des associations qui oeuvre dans le développement durable à garder contact avec la jeunesse motivée et, qui plus est, créative pour sans cesse se réinventer et évoluer avec son temps. Et puis ne l’oublions pas, pour eux, c’est aussi une opportunité concrète de répondre à leur quête de sens et d’orientation professionnelle, tout comme j’ai pu trouver la mienne.

D’un point de vue opérationnel, nous avons aussi la chance d’avoir un réseau de bénévoles divers et variés composé aussi bien de personnes en réinsertion que de personnes en situation de handicap, ou de ceux qui veulent donner de leur temps pour filer un coup de main. Notre réseau régional de bénévoles nous permet de faciliter les démarches afin de laisser libre cours, par exemple, à ceux qui ne voudraient aider qu’une seule fois. Cette opportunité nous permet également d’être contributeurs et preneurs de toutes ces rencontres très riches autant pour eux que pour nous.

Dès lors, notre perspective serait d’amener ce projet vers une coopérative d’intérêt collectif, où chacun pourrait devenir partie prenante en investissant avant tout son temps mais aussi son argent en tant que coopérateur.

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Il est certain que ces deux années mouvementées ont permis à L’Equipière d’évoluer et d’adapter votre modèle au fil du temps. Dès lors, quel bilan dressez-vous 6 mois plus tard l’ouverture de votre enseigne ? Et quel avenir pouvons-nous vous souhaiter ?

Estel Rubeillon : En fait après avoir été porté par l’association Lamas Production, le projet, encore très récent, a poursuivi son chemin vers son autonomie complète. En effet, depuis décembre 2021, nous avons pu nous en détacher en créant l’association « L’Equipière », avec en parallèle l’ouverture de notre boutique quelques mois plus tôt à Rennes. Nous avons aussi lancé notre site internet ce mois-ci.

Cet enchainement de bonnes nouvelles est aussi lié à notre premier magasin éphémère qui a vu le jour à l’Hôtel Pasteur à Rennes. Nous sommes fiers d’avoir pu nous installer définitivement et de pouvoir compter sur le soutien que nous recevons des gens et des acteurs locaux comme la Métropole. Nous avons aussi signé une nouvelle convention avec les déchetteries de la région, donnant accès à leurs ressources multiples et assurant plus que jamais un approvisionnement permanent de nos stocks. Il faut savoir que sur notre territoire breton, les agents sont formés pour accompagner les particuliers vers les caissons de réemploi. Ce qui permet ensuite de les distribuer directement aux acteurs locaux de l’économie sociale et solidaire. Ce ne sont finalement que des preuves que notre projet est reconnu de la part de la Métropole.

Les retours clientèles se rejoignent et énoncent l’aspect pratique de notre modèle qui ne se limite pas à un seul sport. Il est facile de venir à la ressourcerie et de trouver – presque toujours ! – un objet qui correspond aux attentes. Notre force passe également par notre modèle économique qui, au fil des semaines, se stabilise. Tous ces éléments sont hyper structurants et nous permettent de continuer l’aventure avec toujours la même envie.

Les dons des particuliers et les conventions signées sont importants. Y a t-il un levier supplémentaire pour vous permettre de continuer dans cette dynamique d’évolution ?

Estel Rubeillon : Les acteurs qui pourraient rendre ce projet encore plus important sont bien évidemment les associations sportives. Il y a, en effet, les apports volontaires directement reçus en boutique par les particuliers, rajoutez à cela nos collectes directes auprès d’entreprises et d’institutions de la région qui ont plus ou moins bien fonctionné. Aujourd’hui, notre présence sur des foires internationales permet d’élargir notre réseau auprès des fédérations et donc auprès des associations sportives.

Plus concrètement, nous travaillons depuis des mois avec l’association Cercle Paul Bert à Rennes, sur des modules de formations à destination des acteurs du sport de la région. L’enjeu de ces formations est simple et fort à la fois, car ils nous permettra de les sensibiliser sur le réemploi de leurs matériels sportifs respectifs et, espérons-le, aura aussi pour objectif indirect, qu’eux-mêmes puissent agir auprès de leurs adhérents.

Quelle est l’importance que vous accordez aux foires internationales et à ce type d’évènement ?

Estel Rubeillon : Notre présence sur cette foire internationale de Rennes est possible grâce à notre partenariat avec le CROS Bretagne. Celui-ci coordonne et anime le festival des sports et nous aide à entrer en contact avec chacun des acteurs du sport breton. Avec ce partenariat et cette foire, l’objectif sera une nouvelle fois de communiquer avec le grand public pour leur expliquer ce que l’on fait, et comment ils peuvent se rendre utile à notre cause. Par la suite, afin de centraliser les collectes, ils pourront également collecter tout type de matériels sportifs directement chez eux.

que pouvez-vous dire aux jeunes qui nous lisent au sujet du combat que vous menez ?

Estel Rubeillon : Je suis hyper confiante, tout d’abord parce que notre politique publique (régionale, bientôt nationale, croisons les doigts) nous laisse présager d’un avenir radieux. Il y a quelques jours, je roulais à vélo et sur mon chemin, j’ai croisé un camion poubelle où il était écrit : « Arrêtez d’acheter dans le neuf, consommez de la seconde main ». En terme de communication et d’impact, nous sommes convaincus que le message finira par rentrer. Cet exemple – aussi simple soit-il – nous prouve qu’il y a toujours de l’espoir. Je dirais aux jeunes – comme à toutes et à tous – de s’engager, même si ce n’est qu’à leur échelle.

Le mot de la fin serait de nous donner votre composition de la recette gagnante de l’equipière.

Estel Rubeillon : J’aime bien l’idée ! Disons que la recette de la réussite actuelle de L’Equipière ne sera pas forcément celle de demain. Alors sans aucun doute, ce qui ne changera jamais c’est un mélange de bonne humeur (beaucoup !), d’engagement de chacun, d’aucune remise en question sur l’essence même du projet, d’excitation, de passion, de bienveillance et d’humour.

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Hugo Lesne
Hugo Lesne

Ecolosport le PODDCAST explore la façon dont le sport peut contribuer à la réalisation des 17 Objectifs de Développement Durable (ODD) de l'ONU et comment ceux-ci peuvent soutenir le développement du sport.