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Yohan Penel (FFBad) : « Nous voulons une politique vertueuse »

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S’il existe une fédération française pionnière sur la thématique éco-responsable, c’est bien celle du badminton. Yohan Penel, Responsable de la commission « développement durable et citoyenneté » à la FF Badminton et candidat à la présidence de la Fédération, nous a accordé un entretien très enrichissant.

Ecolosport : La Fédération Française de Badminton a inscrit dans son projet fédéral « Badminton 3.0, objectif club » le développement durable comme l’un de ses objectifs prioritaires. Pouvez-vous nous en parler ?

Yohan Penel : Un petit groupe de convaincus s’est saisi du sujet en 2011. La première stratégie « développement durable » était axée sur la compétition. La première étape a été de construire une formation, qui s’appelle OMBER (Organiser une Manifestation de Badminton Éco-responsable), dont nous avons fait la 9ème édition l’année dernière. Le but est de donner toutes les clés aux organisateurs, sur le terrain, pour qu’ils prennent en compte l’éco-responsabilité dans toute sa dimension, de la mobilité aux achats en passant par les déchets. À priori, nous avons été les premiers à lancer ce type de formations dans le monde du sport. Aujourd’hui, nous organisons ces formations avec le tennis de table et le squash. L’objectif de cette première étape était de planter des petites graines chez tous les organisateurs d’événements.

La deuxième étape a été de rendre la Fédération Français de Badminton exemplaire. En 2014, nous avons fait le bilan carbone de notre fonctionnement général et des Internationaux de France, qui sont l’équivalent de Roland Garros au badminton. Les deux bilans carbone vont dans le même sens : ce qui pèse le plus lourd, c’est le déplacement des athlètes. Il y a une réflexion globale à mener, mais ça ne dépend pas que de nous. Nous nous sommes donc focalisés sur ce que nous pouvions gérer et nous avons changé un certain nombre de choses, comme l’éclairage du siège fédéral.

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La Fédération a aussi mis en place le label ECOBaD. De quoi s’agit-il exactement ?

C’est la troisième étape, justement. Ce label récompense la qualité d’une organisation de manifestation sportive. Ce label est axé sur beaucoup de points. Cela va du médical à l’alimentation, en passant pas les transports et les déchets. Ce label ECOBaD se développe. Sur les 4 dernières saisons, il y a une augmentation significative. Nous sommes passés de 47 labels distribués en 2015 à 176 en 2019. Tous les événements qui se sont lancés dans cette démarche l’apprécie.

Globalement, le label ECOBaD se base sur 90 critères, dont le nom de la manifestation, la place du développement durable dans l’organigramme, le nombre de bénévoles engagés, les partenaires solidaires, la communication,  les actions de sensibilisation sur la compétition, le transport, l’hébergement, la restauration, la gestion des déchets, etc. Nous tenons à ce que les organisateurs puissent faire un bilan, puissent analyser ce qu’ils ont mis en place grâce à un certain nombre d’indicateurs, qui doivent permettre de s’améliorer l’année suivante.

Ce label va évoluer, car il venait récompenser seulement les compétitions et pas les clubs dans leur fonctionnement. Nous allons donc lancer une nouvelle stratégie de labellisation pour récompenser à la fois l’événementiel et la vie associative.

A la suite de ces trois étapes – la formation, le bilan carbone et le label, nous avons été les premiers signataires de la Charte des 15 engagements éco-responsables en 2017, pour nos Internationaux de France.

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Crédits : Badmintonphoto

En 2019, après avoir fait un grand bilan, nous avons tout remis à plat et avons décidé de partir sur une nouvelle stratégie qui s’appelle « Badminton responsable ». Nous avons voulu casser les images liés aux mots « développement durable » et « éco-responsable » et utiliser un terme qui parle peut-être davantage aux sportifs. Nous avons trois axes : la gouvernance de la Fédération, le badiste éco-responsable, et le badminton au service de la société. Cette stratégie a vocation à rayonner dans tous les secteurs de la Fédération. Si le service communication fait une action, elle doit le faire par le prisme de cette nouvelle stratégie. Nous voulons une politique vertueuse.

Quelles sont les meilleures bonnes pratiques que vous voyez être mis en place par les clubs et les événements ?

L’un des clubs les plus en pointe sur ces sujets – le club de Montrouge – recense à l’arrivée des participants leur mode de transport. Ceux qui sont venus en mobilité douce ou en covoiturage ont droit par exemple à un bon à la buvette.

Souvent, les bonnes pratiques sont polarisés sur un axe bien précis. Les clubs vont, par exemple, beaucoup se développer sur la partie restauration. Sur certains tournois, j’ai déjà vu 4 poubelles de tri et un compost, avec vaisselle compostable. Concernant les écocups, ils se sont développés. Cela fait longtemps que je n’ai pas vu un tournoi avec des gobelets en plastique. Mais nous sommes tombés dans l’excès inverse : les gens collectionnent ces écocups, ce qui n’est pas du tout la philosophie. Nous valorisons donc ceux qui utilisent et ramènent ces écocups. Le but n’est pas qu’ils prennent la poussière sur une étagère.

L’éco-responsabilité, ce n’est pas juste la gestion des déchets, c’est une vision globale et transversale.

Autre initiative : le badminton a l’habitude de consommer beaucoup de papier sur les tournois. Le club de Montrouge – encore lui – a remplacé ces feuilles par des ardoises, qu’ils prennent en photo à la fin du match, car il nous faut une trace.

Nous avons une problématique propre au badminton : les volants en plume. Ils sont composés de liège, de carton, de plumes d’oies et de colle. Ce dernier composant est problématique et nous ne pouvons pas en faire grand chose. Puis nous avons vu émerger dans la communauté des badistes des entrepreneurs qui ont voulu se saisir de ces enjeux-là. Une start-up vient de se lancer et fabrique des isolateurs thermiques en broyant des volants. Nous avons réussi à faire rencontrer cette start-up avec deux associations solidaires. La première s’appelle Solibad et collecte du matériel de badminton pour l’emmener sur des territoires défavorisés. La seconde s’appelle Chaussettes Orphelines et donne une seconde vie à nos chaussettes. Ces trois structures ont monté un partenariat ensemble pour créer une collecte (volant, raquette, chaussettes) collective. Nous avons ainsi réussi à réunir ces 3 acteurs de l’économie circulaire.

C’est un message que nous voulons aussi faire passer : l’éco-responsabilité, ce n’est pas juste la gestion des déchets, c’est une vision globale et transversale.

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L’argent et le financement sont souvent le nerf de la guerre. Qu’ont à gagner les structures, les clubs, les ligues ou la fédération à faire cette transition écologique ?

Le gain n’est pas forcément qu’économique, il intervient aussi sur l’image. De nombreux clubs se sont démarqués sur leur territoire par cette dynamique. Le club du Volant des 7 rivières, à Bédarrides, organise chaque année, à la fin de la Semaine Européenne du Développement Durable, un colloque sur l’éco-responsabilité dans le sport. Ils sont ainsi devenus l’association pionnière sur le Vaucluse. Ils sont sollicités sur ces sujets.

Il y a aussi un label – pas fédéral mais privé – qui s’appelle Sport Responsable et sur lequel le badminton est la discipline la plus représentée, chaque année.

Signer une charte c’est bien, mais ça ne doit pas se résumer à faire une action dans l’année.

Le but est d’utiliser cette image positive et éco-responsable pour aller chercher des financements. Les clubs peuvent décrocher une subvention sur l’axe éco-responsable, notamment sur les appels à projet de l’Agence Nationale du Sport. L’objectif pour les clubs n’est de ne plus être qu’un acteur sportif mais aussi un acteur socio-éducatif et exemplaire.

Le badminton est un véritable pionnier sur ces questions d’éco-responsabilité…

Effectivement, nous nous sommes lancés avant tout le monde. Nous avons une marge d’avance. J’ai eu deux fois la Fédération Française de Football au téléphone, ils s’y sont mis avec beaucoup de moyens, avec l’équivalent – sur ce sujet-là – du budget global de la Fédération Française de Badminton. Ils vont aller bien plus vite que nous. Ce sont des sujets où il y a une vraie collaboration entre les Fédérations, c’est probablement l’un des seuls sujets qui permet ça. Nous partageons nos bonnes idées et bonnes pratiques. La Charte des 15 engagements éco-responsables a été co-construite par les fédérations. Il y a des synergies possibles.

Il ne faut pas avancer sur ces sujets uniquement pour une question d’image et parce que c’est à la mode. Il y a des fédérations qui le font pour ça – je ne citerai pas lesquelles ! Signer une charte c’est bien, mais ça ne doit pas se résumer à faire une action dans l’année.

Pour conclure, j’aimerais évoquer l’Appel Citoyen pour les Élections Fédérales, qui est un appel à tous les candidat(e)s dans les fédérations sportives, dont les conseils d’administrations seront tous renouvelés d’ici avril 2021. L’idée est de lancer un appel citoyen autour des valeurs du sport, en particulier autour de l’éco-responsabilité. L’objectif est d’intégrer ce sujet et ces enjeux dans les programmes des candidat(e)s. Nous voulons montrer que taper dans un volant, dans un ballon ou courir en rond, c’est bien, mais ce qui est encore mieux, ce sont les bienfaits sur la société.

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